Les pierres-dragons : les gardiennes d’un culte oublié de l’eau en Arménie

Crédit image : Sonashen – CC BY-SA 3.0

Des stèles énigmatiques au cœur des montagnes

Depuis des millénaires, les mystérieuses pierres mégalithiques connues sous le nom de vishaps défient l’interprétation des chercheurs. Érigées entre 1 000 et 3 000 mètres d’altitude dans les hautes terres arméniennes, ces monuments, souvent ornés de représentations de poissons, de peaux bovines ou de figures hybrides, constituent l’un des témoignages les plus intrigants du Néolithique tardif et du Chalcolithique.

Une enquête scientifique d’envergure

Une récente étude conduite par Vahe Gurzadyan et Arsen Bobokhyan, mobilisant cartographie SIG, mesures morphologiques, modélisations statistiques et relevés altimétriques sur 115 sites, révèle des indices troublants : la majorité des vishaps se trouve à proximité immédiate de sources, de canaux d’irrigation préhistoriques ou de réservoirs d’eau. Cette distribution suggère un lien profond entre ces monuments et un culte ancien dédié aux eaux, vitales pour la survie et la prospérité des communautés d’alors.

Le sanctuaire de Tirinkatar, témoin d’un culte millénaire

Le site emblématique de Tirinkatar, situé sur les pentes du mont Aragats, illustre avec force cette relation. Douze vishaps y dominent un paysage sacralisé, au-dessus de canaux et de bassins datant du IVe millénaire av. J.-C. Des analyses de résidus organiques confirment une datation allant de 4 200 à 4 000 av. J.-C., renforçant l’hypothèse d’un ancrage rituel et symbolique lié à la maîtrise et à la vénération de l’eau.

Une logique spatiale révélatrice

Contrairement aux attentes, la répartition bimodale en altitude des vishaps met en évidence une implantation réfléchie, peut-être associée aux cycles saisonniers, aux déplacements des populations ou à des rituels calendaires. Loin d’être de simples stèles éparses, ces pierres monumentales témoignent d’une organisation sociale et spirituelle sophistiquée, conférant à l’eau un rôle à la fois pratique et sacré.

Vers une nouvelle compréhension des mégalithes arméniens

Ces découvertes invitent à repenser l’histoire des sociétés préhistoriques du Caucase. Les vishaps apparaissent désormais non comme de simples blocs dressés dans le silence des montagnes, mais comme les gardiens d’un culte ancestral, où l’eau, source de vie et de fertilité, était honorée à travers la monumentalité de la pierre.

Sources : Nature.com

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