![]() |
| Pierre de Scone exposée au château d'Édimbourg, Édimbourg. Crédits : Wikimédia Commons. |
Trônant aujourd’hui au musée de Perth, la célèbre Pierre du Destin — ou Pierre de Scone — demeure l’un des artefacts les plus emblématiques de l’histoire britannique. Ce bloc de grès, pesant environ 152 kilogrammes, fut durant des siècles le témoin silencieux des sacres royaux. Son destin, jalonné de déplacements, de controverses et de vols audacieux, témoigne des tensions séculaires entre l’Écosse et l’Angleterre.
Aux origines d’un mythe national
Les recherches tendent à situer l’extraction de la pierre dans la région de Perth, au cœur de l’Écosse. Toutefois, son utilisation comme emblème du pouvoir monarchique écossais ne se serait affirmée qu’au XIIIᵉ siècle. Vers la fin de ce même siècle, le roi Édouard Ier d’Angleterre s’en empara et la fit transférer à l’abbaye de Westminster, où elle fut enchâssée sous le trône des souverains britanniques. Ce geste fut largement interprété comme le symbole de la domination anglaise sur le peuple écossais.
L’audace de Noël 1950
Le 25 décembre 1950, un groupe de jeunes nationalistes écossais, mené par Ian Hamilton, s’introduisit clandestinement dans l’abbaye de Westminster pour « rapatrier » la Pierre en Écosse. L’opération, rocambolesque, se solda par la chute accidentelle de la relique, brisée alors en deux parties. Trois mois plus tard, elle fut néanmoins réparée et restituée.
Au cœur de cet épisode se trouve une figure méconnue : Robert « Bertie » Gray, sculpteur monumentaliste, magistrat et fervent patriote. Membre fondateur du National Party of Scotland en 1928 — qui fusionnera plus tard avec le SNP — Gray avait déjà, dès les années 1930, façonné une réplique de la Pierre, envisageant d’échanger l’originale de Westminster contre sa copie.
De Westminster à Perth : le voyage d’une relique
Depuis sa restitution officielle en 1951, la Pierre du Destin a retrouvé un rôle cérémoniel dans les couronnements britanniques. En 1996, dans un geste hautement symbolique, elle fut transférée au château d’Édimbourg, avant de rejoindre le musée de Perth, où elle repose désormais dans une présentation muséographique contemporaine.
Fragments égarés, fragments retrouvés
La dispersion des morceaux
Lors du vol et de la restauration de 1950-1951, Bertie Gray aurait conservé plusieurs éclats de la Pierre, qu’il distribua ensuite comme souvenirs accompagnés de certificats d’authenticité. Selon un article de presse de 1956, pas moins de trente-quatre fragments furent ainsi dispersés.
La professeure Sally Foster, de l’Université de Stirling, a entrepris une véritable enquête archéologique et historique pour retracer la destinée de ces fragments. Ses recherches, publiées dans The Antiquaries Journal, combinent archives, témoignages oraux, consultations muséales et appels au public. À ce jour, dix-sept fragments ont pu être localisés.
Des reliques devenues bijoux
Certains morceaux furent intégrés à des objets personnels : ainsi, la compagne d’Ian Hamilton reçut un broche ornée d’un éclat de pierre, tandis que la politicienne écossaise Winnie Ewing arborait un médaillon contenant un fragment. Non sans ironie, elle déclara un jour souhaiter « être arrêtée pour détention de bien volé ».
Une pierre à l’autre bout du monde
D’autres fragments ont traversé les mers. Une pièce offerte par Gray à une visiteuse australienne fut ultérieurement léguée au Queensland Museum, accompagnée d’une lettre d’authentification et de la carte de visite du sculpteur. Ainsi, la Pierre du Destin s’est trouvée dotée d’une portée géographique et émotionnelle dépassant les frontières de la Grande-Bretagne.
Une mémoire en éclats
Entre mythe, science et identité
Pour Sally Foster, chaque fragment est un vecteur d’histoires imbriquées : un témoin des identités nationales, des engagements politiques et des mythologies collectives. Ces éclats disséminés forment une mosaïque de mémoires, conférant à la Pierre une signification plus intime et plurielle.
Malgré les avancées, dix-sept fragments demeurent encore introuvables. Foster espère que la diffusion médiatique de son travail permettra de lever le voile sur de nouveaux indices. Dans ses conclusions, elle écrit :
« La biographie composite de la Pierre, de ses fragments et de ses répliques constitue la seule voie pour comprendre pleinement la richesse de ses significations contemporaines. »
#PierreDuDestin #HistoireÉcossaise #Archéologie #PatrimoineCulturel #MystèreHistorique #RoyaumeUni #MuséeDePerth #SymbolesNationaux #RechercheHistorique #SallyFoster #StoneOfScone #HistoireEtScience


Commentaires
Enregistrer un commentaire