Des stades d’Olympie aux arènes de Rome : naissance de la passion sportive

Bas Les Pouces de Jean-Léon Gérôme, 1872

Une fascination intemporelle pour la gloire athlétique

L’écrivain athénien Isocrate (436–338 av. J.-C.) observait déjà avec ironie que « nombre de cités honorent davantage ceux qui excellent dans les compétitions sportives que ceux qui, par un effort intellectuel, découvrent quelque chose d’utile à l’humanité ». Cette remarque, vieille de plus de deux millénaires, résonne encore aujourd’hui : pourquoi l’exploit physique et la performance spectaculaire suscitent-ils une telle ferveur collective ?

À l’époque où l’Australie célèbre les finales de ses ligues sportives majeures — football australien et rugby —, il est éclairant de remonter aux origines lointaines de cette passion universelle : les grands jeux de l’Antiquité.

Le calendrier sacré des compétitions grecques

Si les Jeux Olympiques antiques, célébrés à Olympie, demeurent les plus célèbres, ils ne constituaient en réalité qu’une étape d’un cycle de quatre grands festivals sportifs appelé la périodos.

Les Jeux Olympiques, attestés dès 776 av. J.-C., perdurèrent plus d’un millénaire avant d’être abolis sous le règne de l’empereur Théodose le Jeune (408–450 apr. J.-C.). Ils étaient accompagnés de trois autres concours majeurs :

  • Les Jeux Pythiques (fondés en 586 av. J.-C.) à Delphes,

  • Les Jeux Isthmiques (582 av. J.-C.) près de Corinthe,

  • Les Jeux Néméens (573 av. J.-C.) en Argolide.

Ces célébrations, à la fois religieuses et sportives, associaient épreuves athlétiques et concours musicaux. Chaque victoire offrait une récompense symbolique : une couronne d’olivier à Olympie, de laurier à Delphes, de céleri sauvage à Némée et de pin à l’Isthme. Ces trophées végétaux, bien que modestes, incarnaient l’idéal grec de la gloire et de la vertu.

L’honneur du « périodonikès »

Le système de rotation de ces jeux faisait qu’en quatre ans, un athlète pouvait participer à l’ensemble des compétitions majeures. Celui qui parvenait à triompher dans chacune d’elles durant un même cycle recevait le titre prestigieux de périodonikès, littéralement « vainqueur du cycle ».

Ce titre équivalait à une consécration suprême, comparable à ce que représente aujourd’hui un Grand Chelem dans le tennis moderne. Certains champions antiques, tel Ergotélès d’Himère, remportèrent même ce titre à plusieurs reprises, entrant ainsi dans la légende panhellénique.

Le peuple, spectateur passionné

Les foules affluaient de toute la Grèce pour assister à ces spectacles. L’orateur Dion Chrysostome notait que les spectateurs cherchaient avant tout « à voir les athlètes et à se rassasier de nourriture et de vin ».

Les récits de l’époque évoquent une atmosphère d’enthousiasme débridé. L’écrivain Philostrate (190–230 apr. J.-C.) décrivait les gradins en liesse :

« Les spectateurs bondissent, agitent leurs bras, leurs vêtements, se précipitent les uns vers les autres dans une joie incontrôlable… »

Ainsi, dès l’Antiquité, les jeux étaient à la fois un rite religieux, un moment de communion civique et une fête populaire où s’exaltait le corps triomphant.

L’Empire romain : le goût du spectacle total

Si les Grecs célébraient l’effort individuel et la beauté du geste, les Romains, eux, recherchaient la grandeur du spectacle collectif.

Les combats de gladiateurs, les courses de chars et les naumachies — véritables batailles navales reconstituées — faisaient partie de leurs divertissements favoris. L’empereur Claude (10 av. J.-C. – 54 apr. J.-C.) fit ainsi organiser sur le lac Fucin une représentation titanesque mobilisant près de 19 000 combattants, pour la plupart des condamnés.

L’historien Tacite rapporte que « les rivages, les collines et les montagnes formaient un immense théâtre, envahi par des foules venues de toute l’Italie ». Le frisson du danger, la démesure de la mise en scène et la fascination pour la mort faisaient de ces spectacles un moyen puissant de contrôle social et d’émerveillement collectif.

De la Grèce antique à nos stades modernes

Bien que les arènes contemporaines n’abritent plus de combats à mort, la fascination pour les grands rassemblements sportifs demeure intacte. Qu’il s’agisse de stades modernes ou d’écrans géants, l’émotion partagée devant la prouesse humaine continue d’unir les foules comme autrefois, sous le même ciel d’enthousiasme et de rivalité.

Sources : theconversation.com

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