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| Crédits : Archéo Actus. |
Une redécouverte scientifique
Une équipe internationale menée par le Dr Oszkár Schütz a récemment entrepris une vaste étude génomique portant sur 156 individus issus de la période sarmate, datée entre le Iᵉʳ et le Vᵉ siècle de notre ère. Publiée dans la revue Cell, cette recherche vise à élucider les origines, les migrations et les interactions génétiques de ce peuple longtemps relégué à l’ombre de l’histoire.
Les Sarmates : cavaliers des steppes eurasiatiques
Originaires vraisemblablement des régions méridionales de l’Oural, les Sarmates auraient émergé entre le IVᵉ et le IIᵉ siècle avant notre ère. De là, ils migrèrent vers l’ouest, traversant la steppe pontique et atteignant successivement les vallées du Don et de la Volga, le Caucase septentrional, la Roumanie, puis le Bassin des Carpates.
Au Iᵉʳ siècle, ils occupaient la totalité de la Grande Plaine hongroise, formant une puissance redoutée des Romains et alliée à divers peuples germaniques tels que les Marcomans, Vandales et Quades.
Certains historiens ont même suggéré que ces cavaliers auraient inspiré les légendes des chevaliers du roi Arthur.
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| Guerriers sarmates (reconstitution). Crédit : Wikimedia Commons. Costumes de toutes les nations (1882), domaine public. |
Un peuple effacé des mémoires
Malgré leur influence, les Sarmates demeurent aujourd’hui un peuple sans héritiers déclarés. Le Dr Schütz avance plusieurs raisons à cet oubli : les sources antiques, principalement romaines, décrivaient les Sarmates à travers le prisme de la généralisation et du préjugé culturel. Leur absence d’unité politique aurait également limité leur empreinte durable sur les sociétés postérieures.
De plus, leur mémoire fut éclipsée par l’irruption des Huns, dont la domination bouleversa en profondeur la géopolitique et la culture de la région à partir du IVᵉ siècle.
L’empreinte génétique des migrations
Les analyses génomiques ont révélé que les Sarmates du Bassin des Carpates descendaient directement des groupes des steppes de l’Oural et du Kazakhstan, tandis que les Sarmates de Roumanie jouaient le rôle de pont génétique entre ces populations.
Leur héritage génétique témoigne d’un effet fondateur issu d’une migration unique, majoritairement masculine, marquée par la diffusion rapide de l’haplogroupe Y R1a.
À l’inverse, les lignées maternelles présentent une ascendance européenne locale, suggérant que les guerriers sarmates épousèrent des femmes issues des populations autochtones.
Fait intrigant : les premières nécropoles sarmates contiennent une majorité de sépultures féminines, un paradoxe encore à éclaircir.
Mélanges, continuités et héritages
Les chercheurs ont également mis en évidence deux vagues migratoires parallèles : l’une issue du Nord-Ouest européen, l’autre des steppes orientales.
Au IVᵉ siècle, des flux migratoires venus des provinces romaines s’ajoutèrent à ce brassage, forgeant une mosaïque génétique à l’origine de la population médiévale hongroise.
Contrairement à l’idée d’un remplacement total sous la domination hunnique, les données démontrent une continuité biologique notable entre les Sarmates et leurs successeurs directs. Des sources écrites mentionnent même leur autonomie politique jusqu’aux environs de 470 apr. J.-C., avant leur intégration dans le royaume des Gépides.
Les questions qui demeurent
Pour le Dr Schütz, l’un des enjeux majeurs reste d’identifier les populations locales avec lesquelles les Sarmates se sont métissés :
« Nos résultats montrent un déclin rapide de l’ascendance des steppes après leur arrivée dans le Bassin carpatique. Mais nous ignorons encore la nature exacte des peuples autochtones qui ont contribué à ce métissage », précise-t-il.
Les Celtes, Germains et Daces — probable branche des Thraces — figuraient parmi les habitants de la région à cette époque, mais leurs données génétiques restent rares.
De futures études portant sur les territoires romanisés pourraient, selon Schütz, éclairer les interactions entre ces mondes et les Sarmates, en particulier le long des limes romains.
Vers une mémoire retrouvée
Cette étude ne se contente pas d’une exploration scientifique : elle redonne voix à un peuple disparu des récits nationaux. Les Sarmates, cavaliers des vents et artisans d’un métissage complexe, ressurgissent aujourd’hui du silence de la terre, porteurs d’une identité multiple entre Orient et Occident.
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