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Dessin de la sépulture sur lit de Lapwing Hill. Crédit : Jewitt 1870 : 209 dans Noterman 2025. |
Un patrimoine funéraire énigmatique
L’archéologue Astrid Noterman, dans une récente publication parue dans European Journal of Archaeology, s’est penchée sur une pratique funéraire singulière et peu documentée : les sépultures sur lit médiévales. Ce rituel, attesté principalement en Allemagne, en Angleterre et en Scandinavie, témoigne d’une grande diversité régionale dans sa forme comme dans sa symbolique. L’étude révèle qu’il ne s’agit pas d’un modèle uniforme adapté localement, mais plutôt d’un ensemble de pratiques convergentes partageant certains éléments matériels.
L’Allemagne : sobriété et récurrence
En territoire germanique, ces sépultures apparaissent souvent dans des nécropoles dénuées de particularités topographiques ou symboliques. Les défunts y reposaient sur des structures en bois, parfois simplement encastrées dans la terre. Parmi les sites les plus emblématiques figurent Oberflacht et Trossingen (Bade-Wurtemberg), ainsi que la cathédrale de Cologne. Les mobiliers funéraires y sont d’une simplicité notable : bols en bois, anneaux, mais aussi, à l’occasion, des objets plus fastueux comme des lyres, candélabres ou bancs doubles.
Les femmes étaient fréquemment enterrées avec des instruments de tissage : fusaïoles, aiguilles, battoirs ou quenouilles en bois, suggérant un lien entre l’au-delà et les savoir-faire domestiques.
L’Angleterre : usage de tumulus anciens et mobilier démonté
De l’autre côté de la Manche, les sépultures sur lit adoptent un caractère distinct : les lits sont souvent démontés, et les tombes installées soit dans des cimetières classiques, soit dans d’anciens tumulus réemployés. Ce phénomène de réappropriation de monuments préexistants est bien connu dans le contexte funéraire anglais et n’est pas spécifique aux sépultures sur lit.
La majorité des sujets inhumés sont des femmes, à l’exception notable d’un homme retrouvé à Lapwing Hill, dans le Derbyshire.
La Scandinavie : prestige monumental et cosmopolitisme
Dans le nord de l’Europe, le modèle scandinave se démarque nettement. Les sépultures sur lit y prennent des formes monumentales et isolées, parfois intégrées à de véritables navires-tombeaux, comme ceux de Gokstad et d’Oseberg. Situées à proximité de voies navigables, ces sépultures étaient destinées à être visibles de loin, marquant autant le territoire que la mémoire des défunts. Hommes et femmes y étaient ensevelis avec des objets de grande valeur, témoins de leur statut social élevé.
Deux femmes inhumées à Oseberg ont d’ailleurs été identifiées, grâce aux analyses isotopiques, comme originaires des régions bordant la mer Noire — un indice du cosmopolitisme des élites scandinaves.
Des enfants entre traditions locales et migrations
L’analyse des sépultures d’enfants révèle également des disparités géographiques notables. En Allemagne, ce sont les enfants âgés de 3 à 7 ans qui étaient ainsi ensevelis, alors qu’en Angleterre, la pratique concernait plutôt des adolescents de 13 à 18 ans. Fait troublant : certaines de ces sépultures anglaises, notamment à Edix Hill et Trumpington, hébergeaient des individus originaires du continent, selon les analyses isotopiques.
Ces découvertes laissent entrevoir une diffusion mixte de la pratique : enracinée localement en Europe continentale, mais introduite en Angleterre via des mouvements migratoires.
Conclusion : une tradition aux multiples visages
Loin d’être un rituel uniforme, la sépulture sur lit révèle des facettes multiples, entremêlant traditions locales, identités sociales, pratiques artisanales et dynamiques de migration. À la croisée de l’intime et du monumental, ces tombes offrent une fenêtre fascinante sur les représentations médiévales de la mort, du corps et de l’au-delà.
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