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Dans les plaines arides du sud-est de la Turquie actuelle, un écho venu du profond passé a refait surface : deux visages humains sculptés il y a plus de dix millénaires. Mis au jour sur le site de Sefertepe, ces reliefs d’une étonnante ancienneté viennent bouleverser notre compréhension des premières manifestations artistiques du Néolithique, ce moment charnière où l’humanité amorçait son passage de la vie nomade à la sédentarité.
Fruit d’un vaste programme de recherche dédié aux “Collines de Pierre” de la province de Şanlıurfa, ces découvertes enrichissent considérablement la cartographie culturelle d’une région déjà célèbre pour ses sanctuaires monumentaux, dont la réputation de Göbeklitepe a largement dépassé les frontières du monde scientifique.
Une Plateforme Cérémonielle Qui Parle Encore
Dirigée par l’archéologue Emre Güldoğan de l’Université d’Istanbul, l’équipe de fouilles a mis en évidence une structure composée de quatre blocs calcaires soigneusement agencés. C’est sur la face antérieure de deux d’entre eux que s’élèvent les visages gravés, comme si ces pierres avaient été mises en scène pour dialoguer avec une communauté réunie autour d’un espace rituel.
Les deux représentations humaines, tournées vers le nord, se démarquent par leurs caractéristiques formelles et leur facture technique. Elles ne se contentent pas de s’inscrire dans la tradition des sites voisins : elles la redéfinissent.
Deux Styles, Deux Voix du Néolithique
L’un des visages, sculpté en bas-relief, présente des traits volontairement épurés : paupières closes, bouche discrète, nez réduit à son expression la plus minimaliste. Rien de superflu, comme si la figure avait été conçue pour évoquer un état intérieur, une forme d’introspection silencieuse.
À l’opposé, le second visage – véritable prouesse de maîtrise technique – surgit de la pierre en haut-relief, presque vivant. Les contours des yeux, la finesse des pupilles, la tension des arcades sourcilières, la structure du nez et du menton, jusqu’au dessin complet des oreilles, témoignent d’une précision rare pour une œuvre aussi ancienne. On y perçoit une intention : représenter, affirmer, peut-être même immortaliser une identité.
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Une Signature Artistique Propre à Sefertepe
Ces différences saisissantes ne sont pas de simples variantes esthétiques. Elles indiquent l’existence, à Sefertepe, d’un langage artistique singulier, distinct des traditions reconnues à Göbeklitepe, Karahantepe ou Sayburç. Alors que beaucoup pensaient que les communautés néolithiques de Şanlıurfa partageaient un style homogène, ces reliefs rappellent que la créativité humaine, même aux origines de l’histoire, se déployait déjà en une mosaïque de sensibilités régionales.
Le soin apporté aux éléments sensoriels – yeux, oreilles, nez – revêt une importance particulière : il s’agit peut-être de marqueurs identitaires, de symboles rituels ou de représentations d’êtres mythiques dont la signification nous échappe encore.
Vers une Nouvelle Lecture du Monde Néolithique
Les fouilles à Sefertepe ne livrent que leurs premiers secrets. Au fil des campagnes à venir, les archéologues espèrent éclairer les systèmes de croyances, les mécanismes de communication symbolique et l’organisation sociale des premières communautés sédentaires.
Ces deux visages vieux de 10 000 ans – l’un contemplatif, l’autre affirmatif – ne sont pas de simples témoignages du passé. Ils sont les fragments d’une mémoire humaine qui cherche encore à nous atteindre à travers la pierre, rappelant que l’art fut l’un des premiers langages capables de traverser le temps.
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